Depuis plus d’un an, l’ancien président Mohamed Bazoum est retenu par la garde présidentielle du Niger, enfermé avec sa famille. Une situation qui ne semble guère émouvoir la population, alors que la communauté internationale se dit déconcertée par cet état de fait. Pourquoi Bazoum est-il en prison ? Certains proches du régime déchu avancent plusieurs raisons, parmi lesquelles sa lutte contre la corruption.
Bazoum préparait des mandats d’arrêt contre des responsables politiques accusés de malversations, ce qui aurait provoqué l’ire des élites. Il ambitionnait d’assainir la vie publique en éradiquant la corruption, mais ce projet de réforme lui aurait attiré de nombreux ennemis, y compris parmi ses propres alliés. Le Niger, jadis érigé en modèle d’État de droit en Afrique de l’Ouest, semble désormais sombrer dans un climat d’injustice et de désordre.
Bazoum, une victime de son propre camp
Selon plusieurs sources, Bazoum voulait œuvrer avec toutes les forces politiques du pays. Mais cette approche inclusive s’est retournée contre lui. Des ministres de son propre gouvernement auraient divulgué des informations sensibles, affaiblissant ainsi son pouvoir. À l’intérieur de son propre parti, le PNDS, Bazoum avait commencé à écarter les figures de l’ancien régime pour promouvoir une nouvelle génération de dirigeants intègres. Ce nettoyage politique n’a fait qu’alimenter les rancœurs.
L’une des réformes phares de Bazoum était la mise en place d’un ministre chargé de la sécurité présidentielle, un modèle inspiré des démocraties développées. Cette structure politique de renseignement, dirigée par des civils, devait permettre de démilitariser la présidence. C’est cette réforme qui aurait poussé certains généraux à accélérer leur opposition. Parmi eux, le général à qui Bazoum avait confié des responsabilités importantes en reconnaissance de ses services.
Une liste de généraux à la retraite était en préparation, mais il semble que certains, malgré leur âge avancé, n’aient jamais quitté leurs fonctions. Aujourd’hui, la majorité des soutiens politiques et militaires de Bazoum sont soit en exil, soit en prison, dans un Niger qui continue pourtant de se proclamer démocratique et respectueux de l’État de droit.
Le rôle d’Issoufou Mahamadou
Au cœur de cette crise politique, une figure reste énigmatique : celle d’Issoufou Mahamadou. Ce dernier, ancien président et mentor de Bazoum, s’est montré étrangement passif face à l’emprisonnement de son ancien allié. Certains accusent Issoufou de n’avoir rien fait pour défendre son ancien compagnon d’armes, voire d’avoir contribué à son isolement.
Si les rôles avaient été inversés, est-il certain que Bazoum aurait bénéficié du même traitement ? Aurait-il été emprisonné, ou pire encore, assassiné pour protéger la carrière politique d’Issoufou ? Ces questions soulèvent de nombreux doutes quant à la loyauté des hommes politiques nigériens et la solidité de leurs alliances.
Un État de droit en péril
La déchéance de Bazoum semble être le résultat de rivalités internes entre dirigeants politiques et militaires, dans un pays qui a longtemps été cité en exemple pour sa stabilité relative. Aujourd’hui, le peuple nigérien, indifférent ou complice, semble accepter cette dérive autoritaire. Les appels à la libération de Bazoum et de sa famille se multiplient, mais sans réponse concrète des autorités.
Le destin de Mohamed Bazoum, victime d’une trahison à plusieurs niveaux, reflète l’état de la démocratie au Niger : fragile, minée par les intérêts personnels et les luttes de pouvoir. Le rôle exact d’Issoufou Mahamadou dans cette affaire reste flou, mais une chose est sûre : l’ancien président, loué autrefois par Bazoum, est resté silencieux au moment où la démocratie nigérienne vacille.
Malick Ousmane pour MKl