Crise politique dans le Royaume du Gobir : Quel avenir pour Abdou Balla Marafa

Le Chef principal du Royaume du Gobir , Abdou Balla Marafa

« Nous préférons mourir dans une guerre que de mourir humiliés par l’adversaire. » Cette phrase résume la frustration des Gobirawas après la diffusion mondiale de la vidéo du kidnapping du Roi Bawa. « C’était l’humiliation totale », confie un habitant de Gobir. Connu pour son passé de guerriers redoutables, ce peuple refuse d’être réduit à l’impuissance. « Notre histoire témoigne que nous avons combattu aux côtés du prophète Mahomet », rappelle un ancien. Pour les Gobirawas, c’est une atteinte à l’honneur du royaume véritable.

La mort du Roi Isa Bawa , émir du Gobir dans l’état de Sokoto, perçue comme injustifiée, réveille des souvenirs douloureux. Les Gobirawas veulent retrouver les responsables de cette tragédie. Cependant, leur chef actuel prône le pardon, une démarche qui ne fait pas l’unanimité. Certains estiment qu’il devrait préparer son peuple à la guerre, en cas de nouvelle attaque. « Dans l’histoire, nos chefs n’ont jamais demandé pardon sans se défendre », déclarent les opposants à cette approche pacifiste.

L’histoire du royaume de Gobir est marquée par des conflits sanglants. Babari dan Uban Iche, qui régna de 1742 à 1770, puis fils Dan Gude dan Babari, mort au combat en 1777, ont tous deux succombé face aux invasions. « Bawa fut courageux, il est essentiel de préserver la gloire de notre royaume », insistent les Gobirawas. La transition actuelle est perçue comme cruciale pour l’avenir de Gobir, d’autant plus que l’annexion du royaume par le califat de Sokoto en 1808 reste un souvenir douloureux.

Face aux menaces internes et externes, beaucoup refusent une humiliation supplémentaire. Ils rappellent qu’un chef du Gobir se doit d’être ferme et combatif. Certains jugent Balla Marafa, l’actuel dirigeant, inefficace dans sa gestion politique, et appelle à une restructuration du royaume. « Notre faiblesse vient de cette division en plusieurs royaumes. Nous devons nous unir pour être prêts à défendre nos territoires », expliquent les partisans d’une refonte.

Ces groupes d’autodéfense parfois dans logique révolutionnaire témoignent de la montée d’une tension palpable dans la région. Les autorités locales, conscientes de l’escalade, tentent tant bien que mal d’apaiser la situation. Mais face à l’immobilisme apparent des gouvernements, le peuple de Gobir voudrait se préparer à une riposte. « Nous avons été abandonnés à notre sort », déplorent des gobirawas. Ils craignent que les divisions internes n’affaiblissent encore davantage le royaume, rendant impossible toute défense coordonnée.

La fracture entre les partisans de la guerre et ceux qui prônent une approche pacifique devient de plus en plus visible. « Si nous n’agissons pas maintenant, notre royaume ne sera plus que l’ombre de lui-même », martèle un jeune guerrier, la colère dans la voix. Pour lui, l’honneur de Gobir est en jeu, et il est hors de question de laisser la mort du roi impunie. Les plus radicaux évoquent même la possibilité de restaurer un ancien code d’honneur, où toute offense au roi ou au royaume doit être lavée et traquée par les guerriers du royaume. 

Pendant ce temps, la situation politique dans la région devient de plus en plus complexe. Le Nigeria et le Niger, déjà confrontés à de nombreux défis sécuritaires, peinent à contenir les débordements. Les frontières, poreuses, permettent la circulation d’armes, alimentant davantage la colère des Gobirawas. Des rapports indiquent que des groupes armés non identifiés circulent dans les environs, exacerbant la peur d’un conflit à grande échelle. « Nous sommes sur un baril de poudre », avertit un observateur régional.

Le royaume de Gobir, jadis centre de pouvoir et de culture, se retrouve aujourd’hui à un tournant décisif. Ses alliés, peu nombreux, scrutent de loin, tandis que ses ennemis, tant internes qu’externes, se frottent les mains devant une opportunité inédite d’affaiblir.

Le destin du Royaume de Gobir repose désormais entre les mains de ses habitants et du pouvoir politique tant du Nigeria et du Niger . Prendront-ils la voie de la vengeance, au risque de plonger la région dans une guerre fratricide ? Ou sauront-ils trouver un terrain d’entente pour rétablir la paix tout en honorant la mémoire de leur défunt roi ? Une chose est certaine : l’histoire du Gobir est en train de s’écrire à nouveau, et le monde entier a les yeux rivés sur cette situation.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *