Les ressortissants et les rescapés de Karma et des villages environnants sont formels. La tuerie a été l’œuvre de membres des forces de défense et de sécurité burkinabè. Ils l’ont expliqué lors d’une conférence de presse ce samedi 29 avril à Ouahigouya où ils ont trouvé refuge.
« Nous, populations et rescapés des évènements du 20 avril dernier n’avons aucun doute qu’il s’agit des FDS (Forces de défense et de sécurité, ndlr) qui ont été auteurs de ce carnage », ont affirmé ce samedi ces populations de Karma et environs, confirmant ce qu’ils avaient exprimé le 25 avril dernier dans un communiqué.
« Nous ne sommes pas dupes. Nous connaissons bien nos forces de défense et de sécurité », a martelé Moctar Belem, porte-parole des ressortissants et rescapés de Karma et villages environnants, s’en prenant au gouvernement à propos du contenu de son communiqué du 27 avril, mentionnant des tueries intervenues le 21 avril, au lieu du 20 avril.
« Ce communiqué frise l’indifférence et le mépris vis a vis des populations de Karma et environnants », réagit Moctar Belem. « Pire, ce communiqué sème la confusion quant à la responsabilité des FDS sur ce massacre », a-t-il regretté, sans cependant pas manquer de saluer « la réaction et la compassion » du gouvernement.
Revenant sur le bilan macabre de l’expédition, ces ressortissants et rescapés indiquent qu’au total 147 morts ont été dénombrés à Karma, « dont 28 femmes, 45 enfants de 9 mois à 14 ans, et 9 blessés ». « Dans les villages environnants, on dénombre 9 morts, tous des hommes », a ajouté le porte-parole.
Face à la presse, des rescapés ont raconté leur douloureuse expérience. « Nous étions à la fontaine. Nous avons vu nos soldats arriver. Certains ont commencé à fuir. Je leur ai dit de ne pas le faire parce qu’il ne s’agit pas de terroristes, mais de nos soldats venus nous sauver et libérer le pays », se rappelle Aminata Kindo. Mais la suite sera moins triomphale, selon ses dires. « Un homme a été bastonné devant moi. […] Et nous les avons vu sortir des hommes par groupes et les bastonner violemment, avant de tirer sur eux », témoigne-t-elle, révoltée.
Son époux est également resté dans cette tuerie. « Mon mari était couché dans sa maison, parce qu’il était souffrant », confie Aminata, qui poursuit : « quand ils ont tué les autres, ils sont entrés dans sa chambre, l’ont fait sortir, le trainer jusque devant la concession, puis, ils lui ont tiré dessus, avant de le laisser là ».
Les ressortissants et rescapés de Karma et villages voisins disent dénoncer une « barbarie injuste et injustifiée sur les populations », ainsi que des propos diffamatoires et erronés qui circulent sur les réseaux sociaux proférés par « certains suppôts du pouvoir en place ». Ils réclament « toute la lumière », sur cette affaire, et appellent les autorités à porter assistance aux populations affectées par le drame.
Le procureur près de Tribunal de grande instance de Ouahigouya a annoncé le 23 avril dernier, une enquête sur cette affaire, en évoquant une soixantaine de morts. Le gouvernement quant à lui a assuré qu’il fera « absolument tout ce qui relève de ses prérogatives pour la manifestation totale de la vérité ». L’état-major des armées, lui, n’a pas encore réagi.
Abdoul Fhatave Tiemtoré / Oméga Médias